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Projet d’un licenciement massif à SUNU Bank Togo : arrêtez le désastre !

Dans un rapport motivé en date du 31 janvier 2025, SUNU Bank Togo veut procéder à un licenciement pour « motif économique ». Un argument qui ne convainc pas les délégués du personnel et syndicaux qui estiment que dans le vocabulaire de la Commission Bancaire de l’UMOA il n’existe pas le vocable difficulté économique ou licenciement pour motif économique en Banque mais une procédure de résolution de la crise dans une banque assortie d’un plan de redressement et ce n’est pas l’employeur qui initie ladite procédure. Dans le même rapport, la Direction générale de la Banque parle de la politique de crédit. Ils se demandent quelle est la relation d’une masse salariale et un crédit accordé à son personnel ? En clair, pour les délégués du personnel et syndicaux, leur employeur laisse la proie pour l’ombre car pour eux, le motif retenu par leur employeur pour procéder au licenciement n’est pas « objectif » et est basé « exclusivement sur la discrimination ».

Retour sur la situation des salaires à SUNU Bank

Selon les informations, la situation des salaires à SUNU Bank Togo remonte en 2017 et à l’entrée dans le capital social par le Group SUNU, « un accord tripartite » avait été signé le 08 décembre 2017, à Lomé, entre les délégués du personnel et le Conseil d’administration dirigé à l’époque par Mohamed BAH, actuel Directeur Général du Groupe SUNU.

Cet accord prévoyait une augmentation significative des salaires du personnel après un audit du personnel conduit par le Cabinet Africsearch Togo.

« Malgré que les évaluations du Cabinet aient confirmé certains salariés très compétents, le Directeur Général d’alors, Madame Myriam ADOTEVI n’a jamais voulu améliorer les salaires des travailleurs qui détenaient un contrat de travail avant l’arrivée de SUNU Group dans le capital social de la Banque », selon certaines sources.

Par ailleurs, dans sa lettre du 20 septembre 2024 relative au projet de licenciement pour motif économique adressée au Collège des Délégués du Personnel et Délégué Syndical , on peut noter que la masse salariale de la Banque est passée d’ « un milliards huit cent trente-six millions (1 836 000 000) à deux milliards quatre cent seize millions (2 416 000 000) francs CFA  soit une augmentation de plus de cinq millions (500 000 000) de francs CFA portée essentiellement par les salaires des nouveaux salariés recrutés » par la Direction Générale.

Pour les analystes financiers et les gestionnaires de ressources, le constat fait est que les situations des salaires communiquées aux délégués du personnel et à l’inspecteur du ressort contiennent « plusieurs anomalies qui obligent l’employeur à ne pas être transparent dans la communication des documents demandés par ceux-ci ». Cette situation se présente comme suit :

Éléments 2018 2019 2020 2021 2022 2023
Masse salariale 1836 2416 2602 2823 3060 3705
Variation et montants 773 208 226 245 778
Variations pour autres 18 24 26 28 31 37

« Le montant maximum de la variation de la masse salariale pour les primes d’ancienneté, solde de tout compte pour les départs à la retraite ne peut excéder cent millions (100 000 000) de francs CFA par année », a renseigné un gestionnaire.

« De 2019 à 2023, les montants supplémentaires doivent être expliqués par les dirigeants de la Banque, c’est la raison pour laquelle les délégués du personnel et le syndicat exigent des documents pour s’assurer que les montants inscrits dans les états financiers et dans la correspondance de la Direction Générale sont réellement ceux du personnel en service dans la Banque », souligne le personnel.

C’est quoi une Banque ?

Pour mémoire, une banque est une entreprise particulière, elle collecte des dépôts de la clientèle, distribue des crédits et peut faire des activités connexes pour gagner des commissions.

C’est à titre que les états membres de l’UMOA avaient signé le traité de la création de la Commission Bancaire et toutes les activités bancaires visées par la loi bancaire d’un pays membre entrent dans le champ d’application de la Commission Bancaire.

Il en est de même de la masse salariale qui est traitée par la circulaire de la Commission Bancaire relative à la gouvernance des établissements de crédit et des sociétés financières.

C’est pourquoi, le syndicat et les délégués du personnel renvoient la Direction Générale de SUNU Bank Togo à l’avis conforme de la Commission Bancaire sur le dossier de licenciement pour motif économique qui voudrait utiliser la masse salariale.

Le Togo a signé le traité de création de la Commission Bancaire de l’UMOA; les dispositions de ce traité exigent que tout ce qui a trait à la loi bancaire dans un pays membre, nécessite un avis conforme de la Commission Bancaire.

Du point de vue d’un observateur avisé, SUNU Bank Togo initie une procédure de licenciement pour motif économique en se basant sur le code du Travail du Togo alors que le problème posé par cette Institution relève du champ d’application de la Loi Bancaire, et nécessite inévitablement l’avis conforme de la Commission Bancaire de l’UMOA.

Sur ce sujet de l’avis conforme, les syndicats ont adressé une correspondance en date du 09 décembre 2024 au Président du Conseil d’Administration en invoquant la primauté accordée par la Constitution de la République Togolaise aux dispositions des traités, des accords sur la législation nationale applicable et avaient demandé au Président de commettre un audit de toutes les activités de la Banque et d’ouvrir les discussions avec les syndicats.

Pour un Banquier, généralement en matière de licenciement pour motif économique, on note une baisse significative du chiffre d’affaires de l’entreprise concernée mais dans le cas de SUNU Bank Togo, le produit net bancaire augmente régulièrement sur la période concernée comme l’indique les données du tableau :

L’employeur dans son rapport motivé, affirme que sur la période concernée, toutes les évaluations n’ont pas été objectives et non orientées vers le résultat et pourtant il retient l’aptitude professionnelle comme l’un des critères de sélection.

« SUNU Bank Togo a récupéré un outil financier et un patrimoine social non homogène constitué par un effectif pléthorique dont les aptitudes ne cadrent plus pleinement avec les objectifs de productivité, de performance et de rentabilité nécessaires malgré l’organisation des séances de renforcement de capacité effectuées de 2017 à 2023 », a justifié la Banque dans son rapport motivé.

Et bien d’autres aspects qui prouvent que le motif retenu n’est pas objectif et basé exclusivement sur la discrimination selon les délégués du personnel et le syndicat.

Pour la Banque, malgré un réel développement des activités sur les six dernières années, de 2018 à 2023, elle est confrontée à un problème d’équilibre structurel financier comme l’indiquent ses performances financières. « Les résultats financiers obtenus sur cette période sont systématiquement absorbés par des charges d’exploitation élevées, principalement liées à une importante masse salariale, portée par l’effectif de la Banque », a justifié SUNU Bank Togo dans son courrier en date du 20 septembre 2024, adressé au Collège des Délégués du personnel et Délégué Syndical.

« La masse salariale est une charge directe qui n’impacte pas le capital social.  Seules les provisions, les pertes opérationnelles impactent le capital  social d’une banque », a rétorqué un Expert.

Les syndicats avaient constaté cette façon excessive d’augmenter les salaires dans leur corporation à partir de 2018 et le 07 mai 2021, une doléance avait été introduite auprès du Ministre de l’Économie et des Finances d’alors, pour solliciter son intervention pour que toutes les Banques du Togo respectent la circulaire de la Commission Bancaire de l’UMOA relative à la politique de rémunération.

Cette doléance de mise en place de la politique de rémunération a été de nouveau réintroduite auprès du Ministre de l’Économie et des Finances le 03 mai 2022.

Au sujet de la santé financière de la Banque, le personnel  de SUNU Bank Togo avait constaté  que la gestion ne respectait pas les règles de la déontologie bancaire et les délégués du personnel avait exprimé leur peur sur l’emploi du personnel et avait attiré l’attention du Président du Conseil d’administration, par courrier en date du 11 septembre 2023. En réponse, le 14 septembre 2023, le PCA les avait rassurés que par rapport à leur inquiétude sur la dégradation du portefeuille crédit de SUNU Bank Togo, « cette situation est sous contrôle et que ni le capital social de la banque, ni l’emploi du personnel ne serait menacé ».

Malheureusement dans son courrier réponse, le PCA a fait savoir aux Délégués du personnel de SUNU Bank Togo que « la démarche que vous avez utilisée n’est ni responsable, ni constructive ».

Aux dernières nouvelles, des discussions sont en cours avec le Ministre de l’Économie et des finances pour trouver une solution à cette situation.

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