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Togo : L’opposition face à son éternel démon, la division

L’histoire semble se répéter inlassablement. Depuis l’avènement du multipartisme au Togo, l’opposition peine à maintenir une unité durable, offrant ainsi au pouvoir en place un avantage stratégique. La probable implosion du Mouvement de Libération Nationale (Freedom Togo-MNL), pourtant créé avec l’ambition de « libérer le Togo du régime de Faure Gnassingbé », illustre une fois de plus cette incapacité chronique à faire front commun.

Le mardi 28 janvier 2025, François Boko, vice-président du mouvement, a annoncé son retrait de toutes les instances de Freedom Togo-MNL, dénonçant une infiltration par les services togolais. Un coup dur pour une organisation encore jeune, née à peine six mois plus tôt, et qui nourrissait l’espoir d’un renouveau dans la lutte politique. Le MNL, Mouvement de Libération Nationale a été porté sur les fonts baptismaux par 3 Togolais à Paris, le 20 juillet 2024. Il s’agit de Jean Sylvanus Olympio, François Boko et Koffi Yamgname.

« Freedom Togo MLN, mouvement de libération nationale crée le 20 juillet 2024, a été infiltré par les services togolais. Cette infiltration en profondeur leur a permis de prendre le contrôle de certains organes de gouvernance du mouvement et d’en dicter l’agenda. Des divisions et tensions insurmontables sur les orientations stratégiques du mouvement en sont ainsi apparues », écrit Me François Akila Boko, dans le communiqué, en date du mardi 28 janvier 2025. Me François Boko. « Dans l’impossibilité de préserver l’indépendance et l’intégrité des objectifs de Freedom Togo MLN, le vice-président et son courant politique, ont le regret de vous annoncer leur retrait de toutes les instances de Freedom Togo MLN à compter de la date de signature du présent communiqué », a précisé l’ancien Ministre de l’intérieur.

L’opposition togolaise est-elle condamnée à se fragmenter indéfiniment ? L’histoire récente ne laisse guère de place à l’optimisme. Depuis les années 1990, plusieurs tentatives de regroupements ont vu le jour, suscitant à chaque fois de grands espoirs, avant de sombrer dans les querelles internes et les trahisons.

On se souvient des Coalitions Démocratiques (COD1 et COD2) qui, au lendemain de la Conférence nationale souveraine, n’ont pas su s’imposer face aux défis de l’époque. Puis vinrent des alliances comme le Front Républicain pour l’Alternance et le Changement (FRAC) en 2010, le Collectif Sauvons le Togo (CST) en 2012, ou encore le Combat pour l’Alternance Politique (CAP 2015). Chaque regroupement a connu une trajectoire similaire : enthousiasme initial, espoir populaire, puis éclatement progressif sous le poids des intérêts divergents.

La Coalition des 14 (C14), qui avait su mobiliser une large frange de la population après la crise politique de 2017, n’a pas non plus échappé à cette malédiction. Aujourd’hui, Freedom Togo-MNL, qui se voulait une alternative à cette dynamique d’échec, semble suivre le même chemin.

Chaque division au sein de l’opposition laisse derrière elle un goût amer chez les militants et sympathisants qui, lassés des querelles intestines, finissent par se détourner de la lutte politique. Le pouvoir en place, lui, en sort toujours renforcé, observant avec un détachement stratégique ces luttes fratricides qui lui épargnent bien des efforts.

Si la fragmentation de l’opposition togolaise est souvent attribuée aux stratégies d’infiltration et de déstabilisation du régime, elle trouve aussi sa source dans l’incapacité des leaders à dépasser leurs différends et à privilégier l’intérêt général. Les egos, les ambitions personnelles et le manque de vision commune ont toujours eu raison des meilleures intentions.

Face à ce constat, une question demeure : l’opposition togolaise peut-elle un jour vaincre ce démon de la division ? L’expérience montre que seul un projet fédérateur, porté par des leaders capables de faire des concessions et de travailler avec humilité, pourrait inverser la tendance. La clé réside dans la capacité à construire une alliance durable, basée sur une vision partagée et des objectifs clairs, au-delà des calculs partisans et des ambitions individuelles.

Tant que cette prise de conscience ne s’opérera pas, les scénarios se répéteront à l’infini, laissant les Togolais désabusés face à une opposition qui semble courir après l’unité sans jamais la saisir.

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