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Afrique : Quand le peuple transforme ses leaders en demi-dieux

Au Gabon, des jeunes ont récemment entamé une grève de la faim pour appeler le Général Brice Oligui Nguema à se porter candidat à l’élection présidentielle prévue le 12 avril 2025. Ce geste, qui pourrait sembler héroïque aux yeux de certains, soulève en réalité des questions profondes sur la manière dont les sociétés africaines perçoivent leurs dirigeants.

Cette situation n’est pas isolée. En 2021, au Niger, des militants avaient organisé des manifestations pour réclamer un troisième mandat au président Mahamadou Issifou. Contrairement à certains de ses pairs, le président avait choisi de faire respecter la loi en emprisonnant ces militants, rappelant qu’un mandat présidentiel ne devrait jamais devenir un prétexte à l’idolâtrie.

Cette tendance des peuples à ériger leurs leaders en figures quasi divines n’a rien de nouveau. Edem Kodjo, ancien secrétaire général de l’Union africaine, décrivait déjà ce phénomène dans le livre Edem Kodjo, un homme, un destin, écrit par l’Ivoirien Venance Konan. Kodjo affirmait que ce sont souvent les peuples eux-mêmes qui façonnent des dirigeants en demi-dieux, les plaçant sur un piédestal jusqu’à ce que ce culte devienne un piège pour la démocratie.

Ce constat, tristement d’actualité, montre que les peuples, en quête de sauveurs, oublient parfois leur propre responsabilité dans la gouvernance. Ils attendent des miracles d’un homme, au lieu de bâtir des institutions solides capables de garantir un avenir meilleur.

Au-delà des faits, cette réalité interroge : pourquoi continuons-nous à chercher des héros, au risque de sacrifier nos démocraties ? Peut-être est-il temps que nos sociétés revoient leur relation au pouvoir, en cessant de le sacraliser pour le ramener à sa véritable essence : servir le peuple, et non être adoré par lui.

L’histoire nous enseigne que les leaders, tout comme les institutions, sont façonnés par les attentes et les exigences des citoyens. La question reste : serons-nous prêts à rompre avec ce cycle et à bâtir une Afrique où les dirigeants sont jugés sur leurs actes, et non sur l’illusion d’une grandeur fabriquée ?

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