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Togo : Pour une réforme respectueuse de l’esprit universitaire

La semaine dernière, dans l’émission  « Club de la Presse », sur Kanal FM, un débat s’est engagé autour d’une question qui suscite actuellement de vives réactions : la réforme de l’enseignement supérieur, notamment dans le secteur privé, et la mise en place éventuelle d’examens nationaux pour les universités privées.

Le principe fondateur de l’université, dans sa conception même, repose sur l’indépendance académique. Une université est une entité autonome, dotée de la capacité de concevoir ses propres curricula, d’élaborer ses méthodes pédagogiques et, surtout, de délivrer ses propres diplômes selon des standards qu’elle définit et assume. L’essence même de l’université est donc incompatible avec une standardisation rigide imposée de l’extérieur.

La question ne devrait pas être de savoir comment centraliser ou uniformiser les évaluations à travers des examens nationaux  idée qui, à mon sens, dénature l’esprit universitaire mais plutôt de réfléchir à des mécanismes efficaces de régulation, de contrôle de qualité, et d’accréditation rigoureuse. Ce que les autorités doivent viser, c’est l’excellence, la crédibilité et la pertinence des formations dispensées dans toutes les universités, qu’elles soient publiques ou privées.

Instaurer des examens nationaux pour les universités privées reviendrait à nier leur autonomie, à gommer la diversité pédagogique, et à affaiblir la créativité académique. Une telle réforme, si elle voyait le jour, risquerait d’étouffer les initiatives, de produire des clones éducatifs et de fragiliser le tissu même de notre système d’enseignement supérieur.

La réforme souhaitable, c’est celle qui responsabilise les établissements, qui les oblige à la rigueur et à l’excellence, tout en respectant leur liberté académique. L’État doit jouer son rôle de garant de la qualité et non celui d’un maître d’examen dans les universités privées.

En effet, si l’État peut harmoniser certains programmes, notamment dans les filières à fort enjeu socioprofessionnel (médecine, droit, pharmacie, etc.) en instaurant des examens nationaux, il serait contre-productif de généraliser cette logique à toutes les formations. L’innovation pédagogique et la réactivité face aux besoins du marché de l’emploi risqueraient alors d’être freinées. Les universités, en particulier les établissements privés, sont souvent à l’avant-garde dans l’identification des nouvelles tendances et dans la création de filières spécifiques qui y répondent. C’est cette souplesse qui constitue leur force.

Dans cette perspective, l’État devrait recentrer son rôle sur des fonctions stratégiques et de garantie de qualité. Il doit être rigoureux dans l’octroi des autorisations de création d’établissements d’enseignement supérieur, et exercer un contrôle régulier sur la qualité de la formation dispensée, tant au niveau du contenu que du profil et du recyclage des enseignants, ainsi que des infrastructures pédagogiques. Il lui revient également de définir un cadre d’évaluation cohérent, en collaboration avec des instances comme le CAMES, qui reconnaît déjà les diplômes délivrés et évalue les établissements a posteriori. L’État peut aller plus loin en instaurant un dialogue permanent avec les universités pour anticiper ensemble les besoins de la société et structurer une veille stratégique sur les filières émergentes.

Il serait également pertinent d’encourager la mise en place, au sein de chaque institution, de dispositifs d’assurance qualité interne, renforcés par des évaluations externes. Pour accompagner l’innovation sans l’étouffer, une labellisation des filières novatrices pourrait être envisagée, garantissant leur sérieux tout en évitant une bureaucratisation excessive. il est fondamental de soutenir le lien entre formation et recherche, et de favoriser les pédagogies expérimentales adaptées aux contextes locaux. L’État ne doit pas chercher à tout uniformiser, mais à créer un écosystème d’enseignement supérieur de qualité, dynamique, souple et ouvert, capable de répondre aux défis contemporains.

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